Audur Ava Ólafsdóttir revient avec un roman sur une figure de femme libre et indépendante qui va tout faire pour le rester. Une quête initiatique pour cette jeune femme qui veut écrire et vivre de sa plume en Islande en 1963.
Hekla a grandi dans les Datir, au nord de Reykjavik, dans une ferme. Nommée d’après un volcan, elle déploie cette énergie volcanique pour vivre sa vie. Cette vie à la ferme ne lui convient pas, et ce qu’elle veut, c’est écrire, devenir une grande poétesse. La jeune fille décide donc de rejoindre la capitale.
L’indépendance féminine
Hekla est libre, c’est ce qui caractérise la jeune fille. Elle a 21 ans, porte des pantalons, lit, écrit et n’est pas mariée. En 1963, en Islande, elle fait fureur, ne se contentant pas de la place assignée aux femmes. Au travail, elle ne se laisse pas intimidée par les hommes. Hekla a décidé d'être écrivain et elle engage toute sa volonté pour réussir.
« Je me livre à un exercice mental. Si je travaille 9h et je dors 7h, il m’en restera chaque jour 8 pour lire et écrire. »
Elle compte les heures, écrit religieusement chaque jour. Elle contemple les clubs littéraires où ne sont admis que les hommes. Puis, c’est la rencontre avec un homme, Starkdur, ce poète maudit à qui Hekla cache sa passion, ses livres et sa machine à écrire. Elle ne veut pas être comparée à lui, subir ses critiques misogynes parce qu’une femme qui écrit cancer n’existe pas, ce n’est pas ce qu’on attend d’elle.
Le reflet des autres
Comme des pendants à Hekla, on découvre Isey et Jòn, ses meilleurs amis, respectivement mère de famille à 20 ans et homosexuel. Hekla ne trouve pas sa place dans ce rôle qu’on lui assigne mais elle s’en affranchit, ce qui n’est pas leur cas. Jòn est terriblement poétique. Son homosexualité est un crime, ce qui le pousse dans une mélancolie terriblement belle à lire, ses considérations sont autant poétiques que terribles. Il n’aspire qu’à la liberté mais se retrouve coincé dans une vie qui ne lui convient pas : fils de soldat américain et homosexuel, qui se voit obligé d’embarquer sur des bateaux pour pouvoir travailler.
Quant à Isey, sa meilleure amie, elle est ce qu’on attend d’une jeune fille. Elle a le même âge que Hekla mais elle est mariée, avec un enfant et enceinte. Cependant, elle aussi est ouverte à la mélancolie : vivant dans un entresol, sa source de lumière sont des tableaux qui agissent comme une fenêtre sur le monde pour elle. Même si ce personnage représente l’archétype de la jeune femme islandaise, elle non plus ne se satisfait pas vraiment de cette condition. Mais contrairement à Hekla, Isey n’agit pas pour en sortir, elle fait ses activités en cachette et se laisse guider par son mari et sa famille.
Un roman sur l’indépendance, sur les femmes et sur l’amitié, d’une efficacité touchante.
"Miss Islande", Audur Ava Ólafsdóttir, Editions Zulma, 288 pages, 20,50€